De l’accommodation linguistique au changement phonétique : variabilité idiolectale et variation dialectale dans l’anglais parlé à Glasgow (XXe)

La présente thèse propose une exploration du possible lien entre variabilité idiolectale en interaction (accommodation linguistique) à court terme et variation dialectale à long terme, à travers une étude de cas d’anglais parlé dans les classes ouvrières de Glasgow. Nous nous intéressons à l’hypothèse formulée par Trudgill (1986, 2008), selon laquelle l’accommodation linguistique est un des mécanismes du changement phonétique. Grâce à un corpus constitué d’enregistrements de différentes natures réalisés entre 1970 et 2000 (Sounds of the City), nous testons cette hypothèse de change-by-accommodation en comparant (a) les caractéristiques des ajustements à l’interlocuteur au niveau idiolectal (en quelques minutes) pour 146 locuteurs, à (b) celles du changement au niveau dialectal (en diachronie large) pour la communauté sociolinguistique glaswégienne à travers une perspective en temps réel et en temps apparent. Nous étudions deux types de variable linguistique : la qualité vocalique (F1 et F2 des neuf monophtongues de l’anglais de Glasgow) et la quantité vocalique (Scottish Vowel Length Rule). Ce faisant, nous cherchons à identifier les facteurs sociaux et situationnels susceptibles d’encourager ou d’empêcher l’accommodation entre locuteurs. Nos résultats montrent que le maintien idiolectal (absence d’accommodation) est le comportement le plus commun pour toutes les variables phonétiques d’étude. Nous n’avons pas trouvé d’effet de l’âge ou du genre du locuteur et de son interlocuteur sur le comportement accommodatoire adopté ; en revanche, nos résultats démontrent un effet de la situation de contact dialectal ainsi que des caractéristiques situationnelles du locuteur (rôle discursif en particulier). De manière générale, nous ne notons pas de correspondance entre la variabilité idiolectale à court terme et la variation dialectale à long terme : les voyelles qui ont traversé un changement en diachronie ne sont pas celles sur lesquelles les locuteurs s’accommodent le plus fréquemment. Pour autant, nos résultats ne nous permettent pas de réfuter le modèle de change-by-accommodation, considérant que celui-ci repose sur une convergence interlocuteur au cours d’interactions du quotidien, minoritaires dans notre corpus d’étude.