Traduire la poésie en langue des signes – L’empreinte prosodique lors du changement de modalité

Ce travail de recherche s’intéresse à la traduction en français oral de la poésie créée en langue des signes française (LSF) et plus particulièrement à l’impact de la structure prosodique de la LSF sur celle du français en contexte de traduction poétique. Dans toutes les langues, qu’elles soient vocales ou signées, la prosodie permet d’organiser le discours en lien avec sa structure informationnelle, que ce soit en perception ou en production. L’objectif de cette recherche est de déterminer si, dans un contexte de traduction poétique, la structure prosodique de la LSF a un impact sur l’élaboration du français oral, et plus particulièrement sur sa prosodie. Pour mener cette étude, un protocole inédit de recueil et d’analyse de données, qui associe analyse des signaux gestuel et sonore à l’annotation manuelle des deux types de discours, a été élaboré. Nous avons recueilli onze œuvres en LSF de cinq artistes sourds et leurs cinquante-sept traductions, proposées par neuf traducteurs experts en poésie. Dans ce travail, nous avons inventorié les phénomènes prosodiques qui participent à la segmentation des œuvres en LSF, notamment en lien avec mouvements des mains et du buste. Les œuvres ont ainsi été segmentées en constituants selon plusieurs niveaux hiérarchiques. De plus, nous avons montré que l’analyse des traductions en français révèle que dix-huit stratégies traductives en lien avec la prosodie sont utilisées. 74% des constituants prosodiques des traductions ont été identifiés comme directement liés avec les groupes prosodiques de la structure hiérarchique des œuvres en LSF. Cette étude montre que, dans un contexte de traduction poétique, la structure prosodique de la LSF laisse bien une empreinte dans la construction du français.