Communiquer en environnement bruyant : de l’adaptation jusqu’au forçage vocal

Résumé :

Ce travail part de l’observation que certaines personnes sont plus susceptibles que d’autres de développer des troubles de la voix lorsqu’elles sont amenées à communiquer fréquemment dans des conditions perturbées telles que des environnements bruyants. Le but de cette thèse est de comprendre l’origine de ces différences afin de prévenir le forçage vocal.

Jusqu’à maintenant, l’explication de ces différentes sensibilités a été principalement cherchée du côté de la variabilité des constitutions physiologiques et des facteurs environnementaux auxquels sont confrontées ces personnes. Au cours de ce travail, nous allons plutôt explorer l’hypothèse que ces différences puissent également provenir du comportement d’adaptation du locuteur à la situation de communication.
C’est pourquoi nous avons tout d’abord examiné en quoi les différentes modifications acoustiques et articulatoires peuvent être interprétées en terme de stratégies de communication visant à émerger du bruit ambiant, à faciliter la reconnaissance audiovisuelle des unités phonétiques pour l’interlocuteur, à renforcer les indices prosodiques de structuration de l’énoncé ou encore les mots de l’énoncé portant le plus d’information. Nous avons apporté plusieurs arguments en faveur d’une adaptation de la parole dans le bruit qui ne serait pas uniquement vocale, réflexe et subie, mais également en partie intentionnelle, communicationnelle et gérable par le locuteur. Pour cela, nous avons enregistré deux principales bases de données constituées de parole semi-spontanée en interaction avec un interlocuteur et pour une immersion des locuteurs dans le bruit par le biais de haut-parleurs. Nous avons au préalable montré l’apport de ces méthodologies pour pouvoir tester nos hypothèses sur le forçage vocal et sur l’adaptation de la parole dans le bruit.

L’examen individuel des comportements d’adaptation de la parole dans le bruit nous a permis de mettre en évidence des différences au niveau de l’adoption combinée des différentes stratégies de communication –celles-ci n’étant pas équivalentes vis à vis de la charge qu’elles font porter au larynx– ainsi qu’au niveau de la réorganisation de l’adaptation en fonction du contexte (type et niveau de bruit). Nous avons pu relier ces variabilités comportementales à des profils laryngés différents, ouvrant en cela de nouvelles perspectives pour l’étude et la prévention du forçage vocal.

Mots clés : Forçage vocal, Effet Lombard, Production de la parole, Bruit, Stratégies d’adaptation